Le voyage est un moyen d’être sauvé de ce que l’on fuit ou d’atteindre ce que l’on désire.
Article tiré de notre livre : Le Livre du Comportement.
Il existe deux types de voyages. Celui du corps qui implique que l’on quitte un endroit. Et celui du cœur qui chemine du plus bas des degrés vers le sommet des cieux. Il s’agit du plus noble des deux types de voyages. En effet, celui qui demeure dans la condition dans laquelle il se trouvait à sa naissance, s’accrochant à ce qu’il a appris en imitant ses ancêtres, sera dans un état de déficience constant. Il se contentera d’une éducation défectueuse et échangera l’immensité des cieux et de la terre contre les ténèbres d’une prison étroite.
Un poète a dit :
Je n’ai pas vu chez les gens de faute plus grande
Que l’erreur de ceux capables d’accomplir de grandes choses
Mais qui s’en abstinrent.
Toutefois, en raison du fait que celui qui s’aventure dans ce voyage s’expose à un grave danger, on a réduit à néant ses chemins.
Le voyage du corps est de différentes sortes. Il contient des bienfaits et de nombreux méfaits, tels que la solitude et la fréquentation des gens, comme je l’ai détaillé précédemment.
Les bienfaits du voyage résultent du fait que les gens s’y engagent pour fuir ou pour acquérir quelque chose. Fuir peut consister à se sauver d’une situation accablante liée à ce bas monde. Par exemple, une épidémie qui apparaît dans un pays, la crainte des troubles et des polémiques, ou des prix trop élevés.
Les situations accablantes liées à la religion incluent par exemple le cas de l’éprouvé dans son pays par un haut rang, des richesses et d’autres choses qui l’ont tenu loin de la dévotion à Allah. Ainsi, une telle personne préfèrera l’émigration, l’anonymat et s’écartera de la richesse et du prestige. On peut également citer celui qu’on a appelé à faire partie d’une innovation religieuse ou qui exerce un métier interdit. Il cherchera alors ensuite à fuir sa condition.
Quant au fait de voyager pour une affaire importante, le motif peut concerner la vie mondaine comme la recherche de biens et rangs élevés, ou la vie religieuse comme la recherche de la science, l’acquisition d’un bon comportement, ou la contemplation des signes d’Allah sur la terre. On a rarement rapporté que quelqu’un acquit la science sans voyager, et ce depuis le temps des Compagnons (qu’Allah les agréés) jusqu’à aujourd’hui.
Concernant le fait de vouloir découvrir sa propre nature et d’acquérir un bon comportement, c’est là quelque chose d’important, car la route vers l’au-delà ne peut se parcourir sans affiner le caractère et l’éduquer. Le voyage est appelé « safar » (en arabe), car il expose le comportement d’une personne.
Généralement, celui qui se trouve dans son propre pays ne montre pas de mauvaises manières, car il est dans sa zone de confort. En revanche, s’il fait face aux difficultés et aux fardeaux d’un voyage, qu’il n’est pas dans un environnement familier et qu’on l’éprouve par l’éloignement de son pays, alors il montrera son mauvais côté et ses défauts.
La personne dotée d’intelligence qui observe les signes d’Allah sur Sa terre récolte plusieurs bienfaits.
La terre se compose de différentes contrées, elles-mêmes divisées en parties juxtaposées contenant montagnes, vallées, déserts, mers, ainsi que des espèces variées d’animaux et de végétaux. Chaque élément démontre l’Unicité d’Allah et fait son éloge dans une langue éloquente. Ne s’en rend compte que celui qui écoute et qui est attentif.
Quand je parle d’écoute, je fais référence à une écoute intérieure, à travers laquelle on perçoit ce qu’exprime l’état de chaque chose. Il n’y a pas un atome dans les cieux et sur la terre sans que celui-ci ne révèle de multiples signes de l’Unicité d’Allah, l’Exalté.
J’ai mentionné certains bienfaits du voyage tels que fuir un emploi illicite de haut rang, un haut statut ou l’attachement à de trop nombreuses choses. En effet, la dévotion à Allah ne se réalise que lorsque le cœur est libre de tout sauf Allah. On ne peut imaginer qu’un cœur puisse se libérer des choses importantes de ce monde ni des besoins fondamentaux. En revanche, on peut imaginer qu’il soit possible d’amoindrir et de minimiser ces choses. On a préservé les gens qui n’eurent que peu d’attaches, alors qu’on a anéanti ceux surchargés. L’attaché à peu de choses est celui qui ne fait pas de ce monde sa principale préoccupation.
Le voyage permis
Parmi les différents types de voyage se trouve le voyage permis, comme le tourisme. Quant au voyage sans but, qui ne définit aucune destination spécifique ni un endroit connu, il est illicite.
Un hadith rapporté par Tawus stipule que le Prophète (paix sur lui) a dit : « Pas de monachisme, d’ermitage, ni de vagabondage en Islam »[1]
L’imam Ahmad Ibn Hanbal a dit : « Il n’y a pas de vagabondage en Islam. Et ni les Prophètes ni les vertueux ne l’ont pratiqué. »
En raison du fait que le voyage distrait le cœur, on ne doit voyager que pour la recherche du savoir ou pour la visite d’un savant dont la vie peut servir d’exemple.
Les livres traitant des rites du pèlerinage ainsi que dans d’autres endroits mentionnent la bienséance relative au voyage.
Parmi ces règles : le voyageur doit s’acquitter des droits des gens, rembourser ses dettes, préparer les dépenses à venir de ceux dont il a la charge et de rendre aux gens ce qu’ils lui ont confié.
Il convient également qu’il choisisse un compagnon vertueux pour le voyage et qu’il fasse ses adieux à sa famille et à ses amis.
Qu’il accomplisse aussi la prière de la consultation et qu’il parte un jeudi, tôt dans la journée.
Autre chose, il ne doit pas voyager seul, et la majeure partie de son voyage doit se dérouler la nuit. En outre, il ne doit pas négliger les formules de rappel ni les invocations lorsqu’il atteint une étape, qu’il gravit une colline ou qu’il descend vers une vallée. Il doit aussi prendre avec lui ce qui lui sera profitable. Par exemple, un miswak, un peigne, un miroir, une boîte de khol, et d’autres choses de ce genre.
Ce qu’il incombe au voyageur de faire
Le voyageur doit prendre des provisions pour ce monde et pour l’au-delà. Quant aux provisions de ce monde, il s’agit de nourritures, de boissons et des choses dont il a besoin.
Il ne doit pas dire : « Je m’en vais en plaçant ma confiance en Allah, sans prendre de provisions. » En effet, prendre des provisions n’est pas contraire à la confiance en Allah.
Quant aux provisions de l’au-delà, il s’agit de la science dont il a besoin pour :
- se purifier,
- prier,
- connaître les permissions liées au voyage tel que le raccourcissement et le regroupement des prières,
- rompre le jeûne,
- connaître la durée permise de l’essuyage des chaussettes,
- accomplir les ablutions sèches ainsi que les prières surérogatoires de celui qui voyage.
Tous ces principes et leurs conditions sont mentionnés dans les livres de jurisprudence.
Le voyageur doit connaître les éléments qui changent à cause du voyage. Par exemple, connaître la direction de la Qiblah et les temps d’accomplissement des prières. Et c’est encore plus important en voyage que lorsqu’on est chez soi.
Il doit chercher la Qiblah. Cela, en observant les étoiles, le soleil, la lune, les vents, l’eau, les montagnes et les galaxies. Les livres traitant de ces sujets l’expliquent. Les montagnes sont prises en compte, car elles font toutes face à la Qiblah[2].
Quant aux galaxies, elles sont visibles durant la première partie de la nuit. Et ce, au-dessus de l’épaule gauche de celui qui prie, en direction de la Qiblah. Ensuite, leurs sommets se tournent de sorte que dans la dernière partie de la nuit, ils se trouvent au-dessus de l’épaule droite de celui qui prie. On appelle les galaxies les « selles du ciel ».
Il est impératif de connaître les temps des prières.
Le temps de Dhohor débute lorsque le soleil passe le méridien. Le voyageur doit planter un bâton dans le sol, de manière verticale et marquer le point d’ombre, puis observer. Lorsqu’il voit l’ombre décliner, il doit comprendre que le temps de Dhohor n’a pas commencé. Si l’ombre diminue, le voyageur doit savoir que le soleil a passé le méridien et que le temps de Dhohor a débuté. C’est là son premier temps d’accomplissement. La dernière partie de son temps est atteinte lorsque l’ombre d’une chose est de longueur égale à elle.
C’est alors que la première partie du temps du ‘Asr débute. La fin de son temps est atteinte quand l’ombre d’une chose fait deux fois sa longueur. Il a été rapporté que l’imam Ahmad a dit : « Le temps du ‘Asr dure tant que le soleil n’a pas jauni. Si le soleil jaunit, le temps préférable d’accomplissement du ‘Asr a expiré et ce qui reste correspond au temps permis. Et ce jusqu’au coucher du soleil. Pour ce qui est des autres temps d’accomplissements, ils sont connus. »
Source : Le Livre du Comportement – Éditions MuslimLife
[1] La chaîne de narrateurs de ce hadith ne remonte pas jusqu’au Prophète (paix sur lui). ‘Abd Al-Razzaq l’a rapporté sous cette forme. Cependant, le hadith a été rapporté par Al-Darimi avec une chaîne authentique de transmetteur selon Sa’d ibn Abi Waqqas qui a rapporté que le Prophète (paix sur lui) a dit à ‘Uthman ibn Maz’un : « Ô ‘Uthman ! On ne m’a pas commandé de pratiquer le monachisme ». Al-Boukhari et Muslim ont rapporté le hadith avec le mot « célibat ».
[2] NDT : Certaines chaînes montagneuses sont orientées vers d’autres directions.